Bad buzz British Airways : tweet sponsorisé, réputation carbonisée !

Les nostalgiques de l’ère où l’on envoyait bouler les réclamations de clients devraient à tout prix lire la piteuse anecdote survenue à British Airways. Mécontent que la compagnie aérienne ait égaré son bagage, un voyageur a carrément déboursé 1000 $ de tweets sponsorisés pour se plaindre publiquement et mettre en évidence la piètre qualité du service client de la compagnie britannique. Et si on se décidait enfin à comprendre que les règles ont changé avec les médias sociaux ?

Hassan Syed est le dirigeant de Salon Commodities, une société américaine qui fabrique et commercialise des produits de beauté, cosmétiques et capillaires. Il est également à l’occasion un modeste twittos comptant à peine plus de 1200 followers. Le 2 septembre dernier, l’homme a pourtant provoqué un sacré chambardement sur Twitter en exprimant au vu et su de tous son extrême mécontentement envers British Airways. Le litige : une valise perdue par la compagnie aérienne et un service client pas vraiment à la hauteur pour trouver des solutions. Les moyens alors déployés par l’impétrant montrent que marques et consommateurs parlent de plus en plus d’égal à égal.

Il a suffi d’un tweet

Le tweet publicitaire par lequel tout a commencé

Le tweet publicitaire par lequel tout a commencé

Excédé par l’incapacité de l’entreprise à régler son problème à l’issue de son vol, Hassan Syed décide de passer à la vitesse supérieure. Le lundi soir, il se connecte sur la plateforme Twitter pour faire l’acquisition de tweets publicitaires. Bien qu’il ait refusé de confirmer le montant, certains observateurs parlent de 1000 $ déboursés pour pouvoir diffuser à plusieurs reprises le message suivant : « Ne volez pas sur @British_Airways. Leur service client est affreux ».

Là où l’affaire se corse pour British Airways est qu’il faudra attendre le lendemain matin pour que la compagnie daigne répondre à la récrimination de son passager passablement énervé. Entretemps pourtant, le directeur marketing et commercial de la compagnie américaine à bas coût Jet Blue avait lui remarqué le tweet furibard, se fendant au passage d’un commentaire un brin acide à l’égard de son concurrent : « Intéressant : un client mécontent vient d’acheter un tweet publicitaire descendant en flammes avec laquelle il a eu une mauvaise expérience. Il s’agit vraiment d’une nouvelle tendance ! ».

Petit tacle de la concurrence au passage !

Petit tacle de la concurrence au passage !

La réponse tardive de British Airways n’a guère contribué de surcroît à calmer le jeu. Ce n’est que mardi à 10 heures du matin qu’un premier message est émis à l’adresse d’Hassan Syed. Soit plus de 14 heures après le premier tweet de son client, autant dire une éternité sur le Web ultra-connecté ! Le contenu fleure alors bon la tradition rond-de-cuir et fonctionnaire : « Désolé pour le délai de réponse, notre fil Twitter est ouvert de 9 à 17 heures. Envoyez-nous la référence de votre bagage par message privé et nous allons voir ce que nous pouvons faire ». Et d’ajouter ensuite un second message tout aussi ubuesque : « Nous ne pouvons pas vous envoyer un message direct car vous ne nous suivez pas. Si vous souhaitez une assistance, nous avons besoin de la référence de votre bagage ».

Et un bad buzz dans la soute à bagages !

Dialogue de sourds !

Dialogue de sourds !

Alors que la démarche gonflée d’Hassan Syed n’était déjà pas passée inaperçue aux yeux de beaucoup, l’inconséquence du service client de la compagnie aérienne va achever de transformer le pataquès en superbe bad buzz dont les internautes et les médias vont rapidement s’emparer, écornant ainsi largement la réputation d’un des tout premiers acteurs du transport aérien mondial.

La réponse de British Airways est à cet égard symptomatique de ces organisations qui en sont encore à envisager les réseaux sociaux comme un simple canal de communication venant s’ajouter à la palette traditionnelle des outils de communication et de relation client. Calquer le fonctionnement d’un fil Twitter sur l’horloge administrative propre à un service des impôts procède de l’anachronisme le plus délirant ! De deux choses l’une. Soit British Airways s’abstenait de mettre en place un service client sur Twitter, soit il le synchronisait au rythme du pouls perpétuel de la plateforme. Mais en aucun cas, il ne fallait lui appliquer les horaires dignes d’un bureau de poste de quartier ! Surtout lorsqu’on transporte des millions de voyageurs à travers tous les fuseaux horaires de la planète !

Autre erreur commise par British Airways au-delà d’un inacceptable temps de latence à répondre : la démonstration de sa méconnaissance de ses clients. Hassan Syed était en effet abonné au fil Twitter de la compagnie. Or, cette dernière n’a eu à aucun moment le réflexe de vérifier s’il faisait partie ou non des abonnés et l’a traité comme un twittos lambda, l’enjoignant de les suivre pour pouvoir répondre. En termes de personnalisation du service, on a connu des réponses plus inspirées et efficaces ! Ce qui a d’ailleurs valu de provoquer à nouveau l’ire de ce passager décidément infortuné sur Twitter : « @British_Airways : Comment une compagnie milliardaire a seulement un service médias sociaux ouvert de 9 à 17 alors qu’elle opère 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ? C’est à vous de m’envoyer un message direct ».

Le temps du cochon de payant est révolu

Les règles ont changé !

Les règles ont changé !

Même si la réplique d’Hassan Syed était d’une envergure jamais encore vue à ce jour, ce n’est pas la première fois que des marques trébuchent pitoyablement sur les réseaux sociaux. Depuis plusieurs années, la chronique des bad buzz abonde de réactions à côté de la plaque, de messages erronés ou d’automatisation abusive qui transforment la moindre requête client en pantalonnade peu glorieuse pour l’image de l’entreprise qui y est confrontée. Si les premiers à s’être pris les pieds dans le tapis pouvaient encore invoquer l’excuse de la nouveauté, l’argument n’est plus de mise aujourd’hui.

Marques et entreprises doivent impérativement comprendre que la relation client est entrée dans une nouvelle dimension où non seulement la qualité de service est toujours exigée mais qu’en plus, elle est observée par des milliers de personnes elles-mêmes susceptibles un jour de recourir (ou pas) au service de la dite marque. Dans ce contexte, le consommateur dispose désormais d’un pouvoir de nuisance et d’influence beaucoup plus affirmé qu’auparavant où son appel se perdait dans les méandres d’un call centre. Le plantage de British Airways vient à nouveau rappeler que la donne a profondément changé et que le quidam peut à lui seul entacher la réputation d’une marque si celle-ci n’est pas capable d’adopter les réactions appropriées.

Ce n’est pourtant pas une fatalité. La preuve en est avec la FNAC qui avait su rattraper habilement en mai 2013 une situation initialement bien mal embarquée avec une cliente se plaignant sur Facebook. En revanche, cela suppose que l’état d’esprit et la culture client évoluent à l’aune des règles imposées par les médias sociaux. Sans cette nécessaire transformation, il est fort à parier que d’autres bad buzz viendront enrichir une collection déjà forte de quelques beaux spécimens !

A lire en complément

– Saya Weissman – « When consumers strike back : 5 viral customer campaigns” – Digiday – 3 septembre 2013
– « Bad buzz : la FNAC frôle le carton rouge” – Blog du Communicant – 29 mai 2013
– Dan Lyons – « Why would spend 1000$ to complain about a poor service? This guy did » – Hubspot – 5 septembre 2013



3 commentaires sur “Bad buzz British Airways : tweet sponsorisé, réputation carbonisée !

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