Liberté d’expression : A quoi joue exactement Facebook entre un zizi nu et une croix gammée ?

Ce n’est qu’une anecdote comme il en existe (malheureusement) des centaines d’autres. Néanmoins, elle est révélatrice de la bizarre conception à géométrie variable que Facebook applique concernant les propos orduriers tenus sur son réseau. La plateforme de Mark Zuckerberg s’obstine à ignorer les requêtes portant sur des propos racistes, violents et extrémistes. En revanche, la moindre zigounette ou téton qui darde se traduit illico par la suspension du compte émetteur. Et si Facebook s’autorisait à grandir sans pour autant craindre la censure excessive tout en ayant une véritable cohérence ?

Souvenez-vous. Il y a quelques semaines, l’ultranationaliste breton et catholique intégriste Boris Le Lay défrayait la chronique sur Twitter en répandant son fiel antisémite envers le journaliste et chroniqueur Guy Birenbaum. L’affaire avait rapidement buzzé et le Blog du Communicant avait interpelé comme d’autres le site de microblogging pour réclamer la suspension du compte de cet ahurissant extrémiste. En moins de 48 heures, le sujet fut réglé avec efficacité par les équipes de Twitter. Pourtant, le vil et poisseux personnage continue maintenant de sévir sur Facebook. Lequel réseau fait la sourde oreille aux avertissements envoyés.

Un déversoir de haine sans limites

LE LAY - Hitler animauxA peine banni de Twitter après avoir vainement tenté de récréer un nouveau compte sous le pseudo de « Boris de Kermadec », le nazillon Le Lay s’est alors retranché sur Facebook dès le 15 juillet 2014. Absolument pas échaudé par son expulsion de Twitter et encore moins par les (déjà) nombreuses condamnations judiciaires dont il a écopé pour haine raciale, menaces de violence et diffamation, le prolixe furoncle s’en donne désormais à cœur joie sur Facebook pour éructer ses obsessions de race pure et de croisade catholique intégriste.

Si les premiers jours, l’énervé Le Lay s’est d’abord astreint à un registre suffisamment borderline pour ne pas se faire taper sur les doigts, l’impétrant va rapidement dégoupiller. Dès le 17 juillet, il s’en prend au président du CRIF, Roger Cukierman en écrivant ceci : « Cukierman toujours : « Les juifs sont en France depuis 2000 ans, ils sont parfaitement intégrés » -Ce type démontre qu’il ne connait pas l’histoire de ce pays. Du 14ème au 19ème siècle, les juifs étaient persona non grata dans le Royaume de France. On se demande bien pourquoi… ». Puis, il se défoule sur le député UDI Meyer Habib qu’il qualifie élégamment de « loukoum séfarade au torse gras et hirsute » avant de digresser sur le « nazislamisme », son autre fantasme fétiche.

A partir du 24 juillet, le delirium tremens de l’obsessionnel Le Lay s’épanche sans retenue alternant images gore d’enfants palestiniens tués par les obus israéliens, des clichés à double sens du IIIème Reich et des vidéos d’archives des années 40 sur les « vils Juifs ». Tout content de son impunité diarrhéique retrouvée, Le Lay pousse les discours de haine un cran plus loin dès le 30 juillet. Assorti d’un commentaire forcément extatique à ses yeux, il publie une vidéo intitulée « Le Juif Süss ». Tourné en 1940 sur commande de Goebbels, ce navet est un summum de propagande antisémite grave. Depuis, les élucubrations du triste sire ne cessent de s’accumuler à coups de poncifs politico-religieux au goût douteux.

Pour Facebook, tout va bien

LE LAY - Refus FacebookAyant découvert fortuitement le nouveau terrain de jeu de cet allumé de Le Lay (lâchement planqué au Japon pour vociférer ses incantations maladives), j’ai plusieurs fois demandé à Facebook via la fonctionnalité consacrée, de suspendre cette page au regard de l’apologie de la haine raciale, de l’épuration ethnique et religieuse dont elle se prévaut. La réponse a été invariablement la même. Le sieur Le Lay ne contrevient pas aux règles de modération et d’expression selon Facebook (voir également capture d’écran à la fin de ce billet).

Pourtant, j’ai assez étonnamment obtenu gain de cause pour une autre page au fiel également immonde. Celle-ci s’appelait « Je n’aime pas l’islam ». Créée en juin 2014, elle regorgeait de vidéos gore de massacres immondes censés être évidemment commis par des musulmans. Le tout visant à prouver de façon phobique et irrationnelle que tous les musulmans sont des cinglés barbares immondes à l’instar des djihadistes qui viennent d’exécuter lâchement le journaliste américain James Foley. Le 11 août, Facebook a accédé à ma demande et a fait fermer la page en question.

Un zizi est-il plus dangereux qu’une croix gammée ou un appel au Jihad ?

LE LAY - Censure F MartelEn dépit du retrait salutaire d’une telle page méphitique, Facebook continue malgré tout de délirer bien sévèrement dans son approche de la liberté d’expression. Là où par exemple YouTube a prestement procédé au retrait de la vidéo montrant la décapitation de James Foley par les malades mentaux de l’Etat islamique du Levant et où Twitter a fait de même en suspendant les comptes liés à ces terroristes, Facebook poursuit bon gré mal gré sa politique primesautière inconsciente où sergents recruteurs de la « Guerre Sainte » et djihadistes en herbe communiquent paisiblement et déversent leur démence prosélyte sur le réseau.

Pire, Facebook est en revanche inflexible dès que pointe un bout de sein ou un organe phallique un peu trop voyant. C’est par exemple la mésaventure qui est encore survenue le 19 août dernier à Frédéric Martel. Chercheur, écrivain et chroniqueur sur Radio France, il s’est vu censurer une photo de sa timeline au motif qu’on y voyait des manifestants dénudés et comble d’horreur pour la doxa pudibonde de Facebook, quatre ou cinq zizis à l’air libre ! Cette anecdote est très loin d’être un cas isolé. En effectuant quelques recherches sur Google, on s’aperçoit que Facebook joue à cadence régulière à la police des mœurs. A contrario, on trouve encore (trop) facilement des images sanguinolentes, des apologies nazies et des incitations à la haine.

A l’heure où Facebook entend se piquer de nous faire savoir si un article est une parodie ou un authentique reportage, les équipes de Mark Zuckerberg seraient mieux avisées de s’attaquer aux problèmes cruciaux. Aujourd’hui, nombre de moins de 13 ans traînent allègrement sur Facebook même si l’âge légal fixé par la plateforme sociale est de 13 ans. Pour eux, il convient d’opérer un certain tri. De même, Facebook devrait s’attaquer à ceux qui racolent et bourrent les crânes de jeunes en déshérence pour les convaincre d’aller massacrer gratuitement au Moyen-Orient de pseudo-infidèles. Si enfin, des règles plus responsables entraient en vigueur, cela éviterait bien des déversoirs à haine dont les conséquences vont bien au-delà du simple délire digital.

LE LAY - NO FACEBOOK



6 commentaires sur “Liberté d’expression : A quoi joue exactement Facebook entre un zizi nu et une croix gammée ?

  1. Lorak  - 

    L’article met le doigt sur un vrai problème, en effet…
    Facebook est légèrement flottant à ce sujet parce que… eh bien il s’agit d’utilisateurs. Si on les déloge de FB, ils iront grouiller sur une autre plateforme pour s’exprimer.

    Ah et à ce niveau là, on ne parle plus de racisme, mais de pathologie (non, sérieux, en 2014 ?)

    1. Olivier Cimelière  - 

      Si cela peut vous rassurer, la migration vers d’autres plateformes a déjà commencé. Récemment, les dingues de l’Etat islamique du Levant sont partis sur le réseau Diaspora car leurs comptes ont été bannis de Twitter, YouTube, etc …
      Je continue de penser que les plateformes sociales gagneront en crédit, en sérieux et en humanité en ne tolérant pas les extrêmes de tous bords

    1. Olivier Cimelière  - 

      Cher Wilfried

      Facebook est un danger (au même titre que plein d’autres choses) s’il est mal utilisé. On peut lui reprocher bien des choses en effet mais chacun en tant qu’individu a également la responsabilité de faire le tri. Cela peut effectivement passer par le choix de ne plus y être ou bien d’alerter Facebook sur des dérapages qui n’ont rien à faire sur la plateforme

  2. l'Ours  - 

    Et oui, le piège se referme. Quand est-ce que l’on comprendra que Fb est un lieu privé définis par des règles… privées. Depuis dix ans, nous sommes quelques uns à dénoncer un Internet qui glisse doucement vers le consumérisme absolu mais plutôt que de s’organiser, les gouvernements (européens), les geeks ou encore les défenseurs du libre n’ont proposé aucune alternative ! Pas besoin d’être un spécialiste pour prévoir la prochaine étape, la fin de la neutralité du net.

    J’ai bon ?

    1. Olivier Cimelière  - 

      Dans ce cas précis, la neutralité du Net n’a pas grand chose à voir. Il s’agit surtout de régulation de la liberté d’expression (et pas de censure comme certains le brandissent aussitôt dès qu’on parle de mettre un peu d’ordre !) face à des propos que nombre de lois en vigueur condamnent lourdement. Dès lors, pourquoi en effet Facebook s’affranchit-il si facilement de cette dimension ? Certes, le droit US fait de la liberté d’expression un des droits fondamentaux de sa Constitution.

      Mais : 1/Le monde n’est pas réduit aux lois des USA et 2/Facebook ne peut pas fermer les yeux sur les dérives de haine, d’intégrisme délirant (et j’en passe) qui ont des impacts certains sur des individus qui passent ensuite à l’acte. Je suis profondément démocrate et favorable à l’expression du plus grand nombre mais pas de n’importe quoi lorsque la violence, la haine, le racisme, l’homophobie, etc s’en mêlent …

      Facebook n’est d’autant plus pas cohérent qu’il est plus prompt à zapper des photos de sexes plutôt inoffensives et à laisser proliférer des discours de haine qui ont déjà conduit dans un récent passé à des génocides … On ne peut pas tout justifier au nom de la liberté d’expression

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