Interview Le Pen : Pourquoi Anne-Sophie Lapix mérite-t-elle le triple A du journalisme ?

L’interview pugnace menée par la journaliste à l’encontre Marine Le Pen dans l’émission « Dimanche + » a généré une salve d’applaudissements sur le Web et dans la presse. Ce n’est pas tant qu’Anne-Sophie Lapix ait réussi à faire vaciller la dialectique bancale de la présidente du Front National qui a suscité l’enthousiasme mais aussi l’approche journalistique fouillée de la journaliste de Canal +.

Il faut s’en féliciter mais en profiter également pour s’interroger sur ce concert de louanges qui ne doit pas masquer les déviances et les faiblesses d’une profession plus que jamais indispensable.

Foin de discours convenu !

Marine Le Pen a dû mettre un genou à terre devant l’implacable interview d’Anne-Sophie Lapix

C’est un fait indéniable. D’habitude si experte en arguties indémêlables, Marine Le Pen a dû mettre un genou à terre devant l’implacable interview d’Anne-Sophie Lapix. Loin s’en laisser conter par l’attitude contemptrice de la cheftaine du Front National, elle n’a eu de cesse de relancer les questions qui n’obtenaient pas réponse et de titiller avec précision l’argumentaire économique de son invitée politique. Il est évident que l’échange sportif entre les deux femmes a de quoi surprendre. Aujourd’hui, les interviews politiques sont tellement truffées d’éléments de discours et de médiatrainings à gogo qu’elles en sont devenues des exercices compassés où le politique vient vendre sa salade électorale et le journaliste jouer au mieux les faire-valoir, au pire les connivents. On ne citera pas de noms mais certains n’ont pas obtenu des « laisses d’or » pour rien.

Ainsi donc, Anne-Sophie Lapix a soudainement rehaussé le niveau du journalisme politique en faisant preuve d’une inflexibilité totale envers la leader du FN sur le plateau de l’émission dominicale. Ce n’est pourtant pas la première fois que l’impétrante de Canal + accomplit son métier avec rigueur et ténacité. Souvenez-vous en septembre 2011 du mécontentement manifesté ouvertement sur son fil Twitter par Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement. Elle aussi n’avait guère goûté la propension de la journaliste à répéter les questions laissées sans réponse ou à interroger sur des sujets épineux comme le fameux discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy.

Une prestation qui doit interpeler

Anne-Sophie Lapix : « Je n’ai que cette émission hebdomadaire et c’est un luxe pour la préparation »

S’il est totalement mérité, l’élan spontané et unanime envers Anne-Sophie Lapix doit désormais interroger toute la profession et servir de boussole éditoriale pour les confrères et consoeurs qui ne vont pas chômer à l’approche des 100 derniers jours avant le 1er tour de l’élection présidentielle. Car si l’on se penche d’un peu plus près sur la « performance » d’Anne Sophie Lapix, on s’aperçoit qu’elle n’a fait qu’appliquer scrupuleusement (et c’est tant mieux) les fondamentaux du métier.

Des fondamentaux qui exigent de recouper des informations, de s’imprégner dont on va traiter dans un entretien, de disposer d’éléments de contexte et d’être ferme lorsque l’interview esquive ou digresse. Dans une interview donnée au Nouvel Observateur, la journaliste de Canal + explique d’ailleurs clairement sa méthode de travail (1) : « Marine Le Pen est ce qu’on appelle un « bon client ». Mais ce qui était particulièrement intéressant là, c’est qu’elle venait de publier le chiffrage de son programme. J’ai pu l’étudier toute la semaine sur son site qui est d’ailleurs très bien fait. Il y a beaucoup de mesures où les chiffres ne sont pas expliqués. Donc j’ai recalculé moi-même. Je n’avais pas préparé ce clash, mais je trouve que c’était intéressant de voir qu’elle ne maitrise pas le chiffrage de son projet ».

Tout est dit dans cette remarque. Le temps qu’Anne-Sophie Lapix a pu consacrer à creuser ses dossiers, relever les zones d’ombre et/ou incohérences pour faire ensuite réagir la personne concernée. Et c’est bien là le drame des rédactions actuelles : le manque de temps et de moyens. Au-delà de la connivence évidente dont d’aucuns font subjectivement preuve, la plupart des journalistes ne dispose surtout plus du temps nécessaire pour approfondir des sujets comme il se doit.

C’est particulièrement symptomatique pour les médias qui sont lancés dans la course à l’actualité chaude. A force de se marquer à la culotte les uns les autres, ils perdent de vue l’essentiel, à savoir démêler le vrai du faux, le discours honnête de la langue de bois parfaite, etc. Sans parler des reporters qui sont envoyés sur le terrain sans forcément avoir une connaissance préalable du thème qu’ils vont couvrir. Pas étonnant ensuite que dans ces circonstances, on se retrouve avec une information approximative, intoxiquée par le copier-coller des communiqués et rarement mise en perspective.

La solution ?

Anne-Sophie Lapix l’esquisse elle-même (2) : « Je n’ai que cette émission hebdomadaire et c’est un luxe pour la préparation. Le gros du travail est de lire les journaux. Je fais une revue de presse d’une heure tous les jours dans mon café préféré. Ensuite je commence à réfléchir à la structure de mon interview dès le mercredi…».

Lire la suite du billet sur le Plus du Nouvel Observateur

Sources

(1) – Nicolas Chapuis – « Anne-Sophie Lapix : je n’avais pas préparé ce clash avec Marine Le Pen » – Le Nouvel Obs.com – 16 janvier 2012
(2) – Ibid.



10 commentaires sur “Interview Le Pen : Pourquoi Anne-Sophie Lapix mérite-t-elle le triple A du journalisme ?

  1. jean luc Berteloot  - 

    Nul doute qu’ AS Lapix a utilisé sa calculette pour refaire les comptes .
    Elle à plustot été inspirée par les services de Publicis dont son mari est Pdg.
    Je ne savais pas qu’elle avait été formée a Bercy .
    Une taxe sur les importations n’est pas forcément récupérable par l’exportateur
    Qui en général fait payer le consommateur final , cad le personnel qu’il à mis au chômage ,tout en se goinfrant sur les marges
    Mme Lapix n’a rien démontre,si ce n’est sa défence des intérêts du cac40
    La playmate de Gala ne défend pas les intérêts de la même classe sociale .
    Comme Mme Parisot ,poupée gonflable du Medef,Mme Lapix – Sadoun défend les intérêts de son poulailler d’Acajou .

    1. Olivier Cimelière  - 

      Que de violence dans vos propos qui n’engagent que vous.
      Pensez-vous une seule seconde que Mme Le Pen une fois élu entamera une vaste « purge » contre ces nantis que vous abominez ? C’est vraiment terrible de constater que les extrêmes (qu’ils soient de droite ou de gauche) ne sachent développer qu’une vision binaire et outrancière de la société où d’un côté, il y a les gentils injustement exploités et de l’autre, les méchants horriblement exploiteurs.
      Arrêtons avec la grande théorie du complot du CAC40. Tous ne sont pas des philanthropes mais tous ne sont pas non plus des gens sans foi ni loi. Quant à cette lignée Le Pen que vous révérez, croyez-vous qu’elle soit de la classe sociale qu’elle prétend défendre mieux que quiconque ?

      1. JEAN LUC BERTELOOT  - 

        Hé bien,à la moindre pichenette verbale vous montez sur vos ergots,et pour faire bonne mesure vous criez au viol!!Chassez l’instinct de corporation et il revient au galop,au mépris de toute objectivité qui bien sur est votre liturgie!!

        Pour en revenir à AS Lapix:*il ne me semble pas l’avoir entendu demander à Baroin de se justifier vis à vis de son père;ministre,pdg de la gmf et patron du godf…
        *il ne me semble pas l’avoir entendu demander à Aubry-Delors si elle savait quelque chose de l’affaire du CARLTON,car dans ce cas elle n’a pas mené son enquète personnelle!!entre gens du meme monde n’est-ce-pas??

        Bien sur AS lapix n’a pas bénéficié des conseils de Terra-Nova le think thank du PS dont son mari est un membre éminent!!Comme elle ne me semble pas avoir la rigueur scientifique de Marie Curie,je ne pense pas qu’elle fasse preuve d’une grande honnêteté intellectuelle!

        Votre blog du communicant n’est pas autre chose que celui de la langue de bois si cher aux journalistes qui dépendent des autorités au pouvoir pour leur cartes professionnelles!!!

        1. Olivier Cimelière  - 

          Cher Monsieur, rien ne vous oblige à lire mon blog si celui-ci vous déplaît et vous semble au service des castes que vous morigénez en ressortant toutes les vieilles casseroles. Vos « pichenettes verbales » n’amusent que vous et sont symptomatiques des gens obstinément ancrés dans l’anti-establishment absolu.

          Il n’y a aucun instinct de corporation dans mes écrits. Juste des réflexions avec lesquelles on est droit d’être d’accord ou pas d’accord. Je ne prétends absolument pas incarner la vérité d’airain.

          Vos allusions sur François Baroin n’engagent que vous. Toutefois si on vous suit sur ce terrain alors parlons de l’héritage des ciments Lambert dont M. Le Pen n’aime guère qu’on lui rappelle le contexte trouble. C’est bien de penser discerner des connivences et des complots chez les autres (apportez les preuves si vous en disposez -cela intéressera l’ensemble des citoyens). C’est encore mieux d’être lucide avec son propre camp.

          En tout cas, je ne fais parti d’aucune obédience. Je viens d’un milieu modeste et tout ce que j’ai pu accomplir jusqu’à présent, je ne le dois qu’à mon travail. Alors cessez juste de supputer une démarche corporatiste de ma part. Pour le reste, je vous laisse absolument libre de penser que mon blog est de la langue de bois.

        1. Olivier Cimelière  - 

          Bonjour Monsieur

          Sale Crétin ? Minable laquais ? Vous au moins, vous maniez l’art du dialogue avec respect et intelligence.

          Avec vos insultes gratuites de bas étage, vous êtes parfaitement bien à l’image de ces extrémistes en haine de tout ce qui ne leur ressemble pas ou ne partage pas leurs idées. ET lorsque vous êtes à court d’arguments, vous calomniez sans même savoir qui je suis. D’autant plus que je n’ai jamais fait partie des invités du Siècle.

          Vous êtes un triste sire, Monsieur. Restez dans votre bile étriquée. Vos commentaires sont pitoyables et méritent simplement le caniveau par la pestilence qu’ils dégagent. J’ose espérer que nous n’aurons pas des gouvernants de votre genre un jour en France sinon le sinistre Vichy va ressurgir

          1. Daniel Dunkel  - 

            Dire que Madame Lapix mérite le triple AAA de journaliste, alors qu’elle coupe la parole à son INVITEE à tous moments et se permet même d’être agressive, m’autorise à certains excès à votre égard dont je ne retire rien.

          2. Daniel Dunkel  - 

            « Le travail du journaliste consiste à détruire la vérité, à mentir sans réserve, à pervertir les faits, à avilir, à ramper aux pieds de Mammon et à vendre son pays et sa race pour gagner son pain quotidien ou ce qui revient au même, son salaire. Vous le savez comme je le sais, alors qui peut parler de presse indépendante? Nous sommes les pantins et les vassaux des hommes riches qui se cachent derrière la scène. Ils tirent les ficelles et nous dansons. Notre temps, nos talents, nos possibilités et nos vies sont la propriétés de ces hommes. Nous sommes des prostituées intellectuelles.

            John Swinton, journaliste, à propos de la liberté de la presse, lors de son discours d’adieu au New-York Times

            La remarque précédente que je vous ai faites est à prendre comme un compliment de ma part, au vu de ce qu’a écrit votre éminent confrère Monsieur John Swinton

            1. Olivier Cimelière  - 

              Comme d’habitude, vous ne citez que les extraits qui vous arrangent à propos de John Swinton. Sa remarque découle d’un contexte plus vaste où déjà la presse avait des difficultés à faire correctement son travail d’information. Il s’en émeuvait vivement et ne souhaitait pas devenir ce qu’il décrit dans sa citation. Lisez cette page : http://www.rense.com/general20/yes.htm .

              Je vous propose de lire l’extrait du discours de Barack Obama prononcé en septembre 2009 à New York lors d’un hommage posthume en mémoire de Walter Cronkite, journaliste américain surnommé « l’homme qui inspire le plus confiance à l’Amérique » pour ses reportages sans concessions à l’égard des puissants et des riches.

              “Through all the events that came to define the 20th century, through all our moments of deepest hurt and brightest hope, Walter Cronkite was there, telling the story of the American age.
              And this is how we remember him today. But we also remember and celebrate the journalism that Walter practiced — a standard of honesty and integrity and responsibility to which so many of you have committed your careers. It’s a standard that’s a little bit harder to find today. We know that this is a difficult time for journalism. Even as appetites for news and information grow, newsrooms are closing. Despite the big stories of our era, serious journalists find themselves all too often without a beat. Just as the news cycle has shrunk, so has the bottom line.
              And too often, we fill that void with instant commentary and celebrity gossip and the softer stories that Walter disdained, rather than the hard news and investigative journalism he championed. « What happened today? » is replaced with « Who won today? » The public debate cheapens. The public trust falters. We fail to understand our world or one another as well as we should –- and that has real consequences in our own lives and in the life of our nation. We seem stuck with a choice between what cuts to our bottom line and what harms us as a society. Which price is higher to pay? Which cost is harder to bear?
              « This democracy, » Walter said, « cannot function without a reasonably well-informed electorate. » That’s why the honest, objective, meticulous reporting that so many of you pursue with the same zeal that Walter did is so vital to our democracy and our society: Our future depends on it.
              Walter was no naive idealist. He understood the challenges and the pressures and the temptations facing journalism in this new era. He believed that a media company has an obligation to pursue a profit, but also an obligation to invest a good chunk of that profit back into news and public affairs. He was excited about all the stories that a high-tech world of journalism would be able to tell, and all the newly-emerging means with which to tell it.”

              Les choses ne sont pas aussi binaires et dichotomiques que vous l’assénez

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