NKM : le pari de la mairie de Paris en 2014 est-il une utopie ?

En attendant une éventuelle confirmation de Cécile Duflot, le duel électoral pour la mairie de Paris en 2014 pourrait opposer deux têtes de lice féminines aux fortes personnalités : Anne Hidalgo et Nathalie Kosciusko-Morizet qui vient d’annoncer sa candidature pour le fauteuil de premier magistrat de la Ville Lumière. Une intention diversement commentée mais qui pourrait véritablement faire mouche si l’ex-ministre parvient à capitaliser sur ses atouts intrinsèques où l’image sera clé pour l’emporter.

A peine NKM avait-elle officialisé son intention de concourir aux élections municipales de Paris en 2014 que les salves de commentaires plus ou moins amènes ont aussitôt surgi pour qualifier le « parachutage » de la nouvelle prétendante à la succession de Bertrand Delanoë et planter les premières banderilles. Lesquelles oscillent en règle générale entre l’étiquette de « bourgeoise-bohême » pour les plus conservateurs de droite et celle de « réac » pour les plus acharnés de gauche.

Un positionnement médian assumé

Une candidature qui pourrait aller au-delà des lignes politiques habituelles

Unies par leur rejet de l’ex porte-parole de Nicolas Sarkozy, ces réactions traduisent néanmoins un paradoxe intéressant et pas si négatif au final pour l’image publique de Nathalie Kosciusko-Morizet : elle n’est pas si facile à classer sur l’échiquier politique. Certes, la bientôt ex-maire de Longjumeau est adhérente de l’UMP et se situe par conséquent clairement à droite. Néanmoins, elle a toujours su cultiver une petite musique politique nettement moins caricaturale que celle renvoyée par ses détracteurs des deux bords.

C’est précisément ce relatif atypisme qui constitue un de ses premiers atouts pour prétendre sérieusement à investir les ors de la Mairie de Paris en 2014. Longtemps à droite puis maintenant à gauche depuis les deux mandats successifs de l’actuel locataire, la capitale s’est généralement d’abord donnée à des personnalités affirmées comme Jacques Chirac et Bertrand Delanoë et où les étiquettes partisanes pèsent moins dans le vote qu’ailleurs. Doté d’une moindre envergure, Jean Tiberi n’avait d’ailleurs pas réussi à se faire réélire en 2001 à la différence des deux autres, chacun étant à sa manière une figure de la vie politique française faisant briller Paris (ou du moins s’y efforçant !).

François Fillon ayant abandonné et Jean-Louis Borloo ayant renoncé, il existe indéniablement une opportunité électorale pour une figure politique de premier plan à Paris. Même si NKM sera une toute jeune quadragénaire en mai prochain, elle aligne déjà un impressionnant pedigree politique avec à la clé des responsabilités ministérielles successives à l’Environnement, au Numérique, aux Transports et au Logement. Un CV qui lui vaut d’être une personnalité politique médiatisée qui compte au point même que ses initiales sont aujourd’hui devenues un acronyme presqu’aussi fameux que celui de DSK ou PPDA !

Tout n’est pas certes joué …

A droite mais capable de suivre sa propre ligne

Le tapis rouge n’est certes pas encore totalement déroulé jusqu’aux marches de l’Hôtel de Ville. Un récent sondage LH2 – Le Nouvel Observateur montre que la notoriété de Nathalie Kosciusko-Morizet n’équivaut pas celle des barons de l’arène politique, notamment à droite où Jean-François Copé, François Fillon et Nicolas Sarkozy continuent de truster les parts de voix au sein de l’opinion publique. De même, ils sont seulement 33% des sondés à avoir une opinion positive envers la quadra contre 39% nourrissant une opinion négative.

NKM a donc encore du chemin à parcourir et une notoriété à consolider pour s’imposer comme figure de proue, surtout depuis que l’UMP a décidé d’en passer par des primaires pour désigner sa tête de liste aux municipales parisiennes de 2014. Pour autant et en dépit de la pétaudière actuelle qu’est l’UMP à Paris, l’ex-ministre du gouvernement Sarkozy peut séduire des Parisiens qui sont majoritairement ancrés à gauche depuis mars 2001.

Bien qu’elle doive probablement plus s’affiner et s’affirmer, sa ligne politique l’a d’abord tenu à l’écart du piteux duel de chiffonniers que François Fillon et Jean-François Copé se sont livrés pour la présidence du parti. Tandis que de nombreux quadras prometteurs comme Laurent Wauquiez (soutien de Fillon) ou Luc Châtel (soutien de Copé) alimentaient ardemment le pugilat, NKM s’est efforcé d’incarner une voie médiane rejetant les bagarres d’appareil. Cela peut constituer un élément de séduction pour l’électorat parisien soucieux d’avoir un maire avant tout dynamique et dédié à la renommée de sa ville même si ce dernier nourrit secrètement ou pas des objectifs présidentiels. Chirac l’a bien fait. Delanoë y a songé.

Elle n’est pas suspecte de dérive droitière

Un brûlot clairement anti-FN

Ensuite, NKM s’est toujours très fermement démarqué des positions de la droite dure qui flirtent de plus en plus fréquemment et ostensiblement avec le Front National et ses objurgations nationalistes. Quitte à froisser dans son propre camp, elle a ainsi publié en 2011 un ouvrage intitulé « Le Front antinational » où elle exprime sans ambages son rejet des thèses lepénistes. Outre les récriminations outrées de Marine Le Pen, cela lui a valu de devoir ferrailler avec les membres les plus durs de l’UMP.

A l’issue de l’élection présidentielle perdu en mai 2012, elle a pourtant récidivé sur ce thème en accusant nommément, Patrick Buisson,  l’éminence grise de Nicolas Sarkozy d’avoir tiré la campagne vers des idées maurrassiennes jugées détestables. Un tel positionnement est un avantage électoral à Paris où le Front National n’a jamais réellement réussi à s’implanter, ni à percer significativement.

Elle a une vraie expertise verte

Sa fibre verte n’est pas feinte (photo AFP)

Une autre thématique joue également en faveur de la réputation de Nathalie Kosciusko-Morizet : l’environnement. Contrairement à d’autres politiques de droite et de gauche qui se piquent d’écologie de façon opportuniste et tactique, NKM a toujours affiché des convictions consistantes en matière de développement durable et de protection de l’environnement. Au point même de claquer un jour la bise à José Bové sous l’œil gourmand des caméras de télévision et de déclencher ainsi des cris d’orfraie dans son propre camp devant cette « pactisation médiatique » incongrue à leurs yeux !

Or la problématique verte est inéluctablement appelée à peser de plus en plus lourd dans les débats municipaux de la capitale. Son expertise avérée dans le domaine peut être un tremplin gagnant face aux élus écologistes qui affichent des positions radicales qui ont l’art d’exaspérer nombre d’habitants parisiens. Son souci de concilier économie et qualité de vie est de toute évidence un point fort qui peut faire pencher la balance auprès des électeurs parisiens amoureux du Vélib et des espaces verts mais pas forcément fanas de mesures ostracisantes à l’emporte-pièce.

Elle est une femme moderne et battante

Quadra battante

Dans le bal des prétendants UMP à la magistrature suprême de la ville de Paris, NKM a déjà plusieurs longueurs d’avance sur une autre jeune femme tout autant avide de mandats électoraux : Rachida Dati. Or, à la différence de cette dernière certes déjà maire du très chic 7ème arrondissement, NKM ne cultive ni l’attitude dilettante de sa camarade de parti (on se souvient de ses textos sans fin en pleine séance du Parlement européen), ni son côté frivole et mondain dont les magazines de papier glacé raffolent régulièrement.

NKM est au contraire élégante, peut-être un peu bourgeoise glamour et beauté froide par instants mais elle contrebalance cette perception avec une image de bosseuse, de femme de terrain moderne (d’autant plus qu’elle a été maire d’une cité de banlieue complexe) et au caractère bien trempé. On se souvient encore de sa saillie verbale sans gants à l’intention de son ministre de tutelle Jean-Louis Borloo, qu’elle accusait « de fuir ses responsabilités ». Elle s’était aussi attaquée à Jean-François Copé suspecté de ne pas jouer le jeu sur un projet de loi sur les OGM.

Déjà dans la poche ?

Objectif proximité avec les électeurs parisiens

Il serait néanmoins exagéré à plus d’un an du scrutin municipal de déjà voir Nathalie Kosciusko-Morizet ceinte de l’écharpe de maire de Paris. Maintenant qu’elle est officiellement candidate, NKM va devoir travailler une image dégageant plus de proximité et moins celle de grand commis de l’Etat. Ce pari est à sa portée. Un reportage récent du Nouvel Observateur auprès de ses futurs anciens administrés montrait que l’édile qu’elle était, savait être présente et jugée proche des habitants et qu’elle était globalement estimée pour le travail accompli.

La conquête de Paris sera autrement plus subtile car il faudra habilement savoir concilier harmonieusement les aspirations des quartiers aisés avec celles des quartiers populaires et des enclaves bobos toujours influentes dans le débat public parisien. A cet égard, NKM pourrait capitaliser là aussi sur un atout dont peu de politiques peuvent véritablement se prévaloir aujourd’hui : l’usage des réseaux sociaux pour assurer un lien plus direct.

Forte d’un historique profil Twitter aux 210 000 followers (contre 82 000 pour Anne Hidalgo), elle a d’ailleurs ouvert ces derniers jours un deuxième fil baptisé @nkm_paris et un site dédié à sa candidature à la primaire ouverte pour Paris. Une chose est certaine : l’élection se jouera aussi sur la capacité à nourrir une image d’avenir pour Paris. La bataille promet d’être intense.

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