Optic 2000 & Johnny : Quoi, ma gueule, qu’est-ce qu’elle a ma gueule ?
C’était attendu mais c’est désormais officiel. Optic 2000 met un terme à son contrat publicitaire avec Johnny Hallyday. La marque de lunettes entend mettre en avant des valeurs que le rocker national n’incarne plus. Divorce judicieux ou erreur de casting ?
Johnny Hallyday va pouvoir entonner le refrain du « chanteur abandonné », l’un des titres fétiches de son répertoire depuis que la marque Optic 2000 a décidé de ne pas prolonger le contrat d’homme-sandwich qui liait Johnny à celle-ci depuis 2002. Dix ans plus tard, l’opticien clôt le chapitre Hallyday qui lui a entretemps permis d’exploser en termes de notoriété et de ventes. Yves Guenin, secrétaire général d’Optic 2000 a justifié sa décision irrévocable (1) : « Nous souhaitons désormais mettre en avant les valeurs du made in France, du Téléthon et sur la proximité de l’opticien avec sa ville. L’image de Johnny qui vit entre Los Angeles et la Suisse ne nous correspond plus. L’air du temps a changé, on est passé des années fric et des années stars à des années citoyennes, des années de crise ».
De l’imprévisible équation des stars et de la pub
De fait, l’image de Johnny a substantiellement évolué ces dernières années. Si elle a permis d’extirper Optic 2000 du relatif anonymat dans lequel la marque végétait, elle est devenue au fil des ans source de tracas pour les équipes marketing de l’opticien.
Au point de commencer à considérer un désengagement progressif d’avec l’idole des jeunes. L’an passé, c’est ainsi que sa jeune épouse s’est vue signifier son congé pour être passée de jeune maman sage à fashion-addict délurée.
Aujourd’hui, c’est au tour du rocker de devoir quitter ses montures favorites pour cause d’image franchement trop tapageuse et en décalage croissant avec le positionnement que souhaite refléter Optic 2000 : une marque abordable et de proximité avec ses 1200 magasins en France. Tout le contraire de l’enfant terrible du rock français dont le côté bling-bling n’a cessé de sombrer dans le clinquant, la rubrique « faits divers » avec le Dr Delajoux et le caprice à répétition. A tel point que le chanteur refusa même récemment de tourner certains spots prévus à ses engagements ou de vouloir imposer via ses agents, un nouveau photographe sulfureux et connu pour ses œuvres pornos !
Accoler son image à une célébrité comporte toujours une part de risque pour une marque. Le partenariat peut certes booster la notoriété à une vitesse que même la plus astucieuse campagne publicitaire ne saurait générer. Mais le caractère insaisissable ou imprévisible de certaines figures connues peut également ruiner ou entacher aussi vite les valeurs qu’entend véhiculer une marque. Souvenons-nous du mannequin Kate Moss virée par H&M après qu’un tabloïd anglais ait révélé, photos trash à l’appui, sa toxicomanie. De même, l’actrice Emmanuelle Béart fut exclue de chez Chanel après que celle-ci se soit publiquement engagée aux côtés des sans-papiers de l’église Saint-Bernard. A cet égard, la séparation entre Optic 2000 et Johnny Hallyday vient donc conforter cet axiome communicant de l’imprédictibilité des stars.
Une décision logique
Au-delà de l’existence fantasque de l’ex-idole des jeunes pouvant brouiller l’image d’Optic 2000, la séparation apparaissait surtout comme inéluctable depuis que la marque d’optique a choisi de refonder sa communication autour des « valeurs citoyennes » selon les mots même de son secrétaire général. Le hiatus sautait alors aux yeux : comment continuer à appuyer sa notoriété sans risques sur celle d’un individu dont l’exil fiscal entre Suisse et Californie a nourri les gros titres des médias ? Surtout lorsqu’en plus l’opticien lance une gamme de lunettes « made in France » pour conquérir le cœur des consommateurs tricolores. Difficile dans ces conditions d’être cohérent en poursuivant une collaboration avec quelqu’un qui passe son temps à fuir les impôts de son pays natal tout en brassant des millions d’euros à souhait !
Un autre aspect, moins évoqué depuis que la nouvelle de la rupture est publique, a pu fort probablement jouer : la créativité satirique que les campagnes de l’opticien avec Johnny généraient en abondance. Certes, il y a toujours eu (et il y aura encore) des détournements sarcastiques de publicité. Mais avec Johnny comme égérie, Optic 2000 s’est vu souvent brocardé. C’est notamment le cas avec les Guignols de l’Info sur Canal + qui s’en sont régulièrement donné à cœur joie pour moquer le rocker et son cri rauque et tonitruant d’Optic 2000. Ou encore cette vidéo parodique de l’émission « Groland » sur Canal+ :
Si l’humour et la dérision ne sont pas forcément contre-indiqués pour faire connaître une marque (on se rappelle à ce propos de la fameuse boisson chocolatée Cacolac ressuscitée par la marionnette du footballeur Jean-Pierre Papin), ils peuvent s’avérer à terme à double tranchant, voire ringardiser cette même marque.
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Sources
(1) – Lena Lutaud – « Optic 2000 – Johnny Hallyday, les vraies raisons du divorce » – Le Figaro – 24 mai 2012