Fail Facebook du conseiller com’ de l’Elysée : De l’importance du personal branding

A peine nommé et déjà en posture délicate, Gaspard Gantzer, nouveau conseiller communication de l’Elysée, aura tout loisir de méditer ces jours prochains sur la gestion de la réputation numérique personnelle. Après que des petits malins aient visité sa page Facebook personnelle et déniché des clichés embarrassants, l’imbroglio illustre impeccablement les enjeux d’image auxquels doit désormais se confronter chaque individu ayant une certaine exposition publique. Rappel des fondamentaux en matière de personal branding.

La cellule communication de la présidence de la République aurait probablement fait volontiers l’économie de ce nouveau buzz encombrant. Après les moqueries de la Toile autour d’une possible nomination de Claude Sérillon en charge du Web élyséen puis l’affaire des bizarres abonnés twittos du conseiller Faouzi Lamdaoui, c’est au tour de Gaspard Gantzer d’inscrire son patronyme au frontispice des fails digitaux du palais de la présidence. Pour avoir omis de sécuriser l’accès à sa page Facebook personnelle, le jeune homme a soudainement vu surgir sur les réseaux sociaux, des photos de fiestas enfumées où il apparaît avec ce qui s’apparente fort à une cigarette qui fait rire. Bien que le fait de fumer un pétard ne mérite pas franchement d’être cloué au pilori par quelques âmes bien pensantes, le cliché fait forcément un peu tâche lorsqu’on incarne désormais officiellement les règles protocolaires de la République.

Ta présence numérique, tu géreras

Une des photos par lesquelles le bad buzz est arrivé !

Une des photos par lesquelles le bad buzz est arrivé !

Etablir sa présence numérique n’est pas un acte neutre. Chaque expression que tout internaute choisit de partager est en effet instantanément répercutée selon des processus de viralisation qu’on ne connaît jamais totalement. De plus, celle-ci est également et surtout systématiquement gravée pour l’éternité dans la mémoire des entrelacs du Web. Certes, d’aucuns diront qu’il existe encore la possibilité de ne pas exister sur Internet en se tenant soigneusement à l’écart des réseaux sociaux. A ceux-là, il faut vite rappeler que leur agoraphobie numérique ne les immunisera pas pour autant d’un fail réputationnel. Lorsque vous êtes un personnage publiquement exposé ou pouvant le devenir un jour, il y aura toujours des individus pour parler de vous et exhumer des contenus en des termes que vous ne maîtrisez nullement.

Ce préambule étant précisé, il est donc conseillé de se préoccuper de son identité numérique en investissant les espaces les plus pertinents avec ses activités professionnelles et ses passions personnelles. Surtout lorsqu’on est amené à exercer une vie publique qu’il s’agisse d’une conférence donnée dans le cadre d’une convention ou de l’animation bénévole de la kermesse de son village. En d’autres termes, il s’agit ni plus ni moins de transposer en version digitale ce que vous êtes intrinsèquement dans le monde physique. Cela n’implique pas pour autant de se décrire aussi précisément qu’un interrogatoire de police ou un formulaire administratif, ni de déballer in extenso les moindres recoins de votre agenda. En revanche, cela suppose d’avoir un minimum de contrôle sur l’image que vous entendez donner à celles et ceux qui peuvent lire, voir et écouter vos contenus.

Dans le cas de Gaspard Gantzer, il est assez surprenant que ce dernier n’ait pas pris la peine de calibrer le niveau de visibilité de sa page Facebook. Enarque et côtoyant très tôt les cénacles du pouvoir, le jeune homme était de toute évidence appelé tôt ou tard à prendre la lumière médiatique. Or, à chaque nouveau visage débarquant dans l’agora publique, le réflexe est désormais d’aller faire un rapide check-up de l’identité numérique de l’impétrant en question. En laissant traîner au vu et su de tous des photos décalées avec la perception que nourrit en règle générale l’opinion publique envers ce que doit être en principe un haut fonctionnaire, Gaspard Gantzer se mettait donc potentiellement en porte-à-faux. Sitôt sa nomination annoncée, l’accroc n’a pas manqué de se produire.

La crédibilité se joue désormais en 2D

Même à l'étranger, les twittos se sont gaussés de l'histoire

Même à l’étranger, les twittos se sont gaussés de l’histoire

Auparavant, les choses étaient effectivement plus simples. Un personnage public pouvait commettre les frasques les plus endiablées sans forcément craindre de se retrouver quelque temps plus tard à la Une d’un journal avec le compte-rendu illustré de sa bamboche. Même si le bouche-à-oreille persifleur pouvait éventuellement écorner à la marge, celui-ci n’avait pas l’impact viral des réseaux sociaux pour brouiller instantanément une image. Qu’on l’accepte ou non, les règles du jeu ont radicalement changé aujourd’hui. N’importe quelle figure publique peut de fait se faire épingler par le smartphone indiscret d’un quidam qui tout fier de sa trouvaille, s’empressera d’en informer sa communauté et d’en multiplier l’impact. C’est sans nul doute agaçant mais c’est incontournable.

La crédibilité d’une personnalité publique se gère désormais en tenant compte de la porosité accentuée entre vie privée et vie professionnelle du fait de cette connectivité ubiquitaire capable de tout faire connaître en quelques minutes. Pour s’en convaincre, il suffit de se rappeler à quelle vitesse l’arrestation de Dominique Strauss-Kahn à New York a été sue du monde entier. Conséquence : cela impose un devoir de vigilance. Sans non plus tomber dans la paranoïa, l’excès de contrôle ou s’interdire tout amusement, il convient néanmoins de cultiver une certaine attention et de se définir quelques règles personnelles en matière de contenus que l’on met en ligne et que l’on est prêt à assumer le cas échéant.

Gantzer - Nuage motsLes réseaux sociaux sont aujourd’hui autant scrutés que les actes de la vie publique classique. Raison de plus pour ne pas y laisser des traces qui peuvent affecter par la suite la crédibilité professionnelle. A cet égard, les mois à venir vont être sûrement pénibles à gérer pour Gaspard Gantzer. Pour quelque temps, sa crédibilité professionnelle risque fort d’être chahutée par la réminiscence régulière des photos impromptues. Bien qu’une fumette en soirée n’ait rien à voir avec les compétences de la personne, le télescopage des deux parasite inévitablement la perception que l’opinion publique se forge mais également les journalistes et les détracteurs. Déjà, le surnom de « conseiller fumeur de joint » circule allègrement dans les commentaires. C’est le genre d’étiquette dont on se passe volontiers lorsqu’on occupe une fonction en vue.

Pour s’en convaincre, il suffit de se remémorer la propension de François Hollande pour les petites blagues. Tant qu’il n’était pas au pouvoir et que ses bons mots restaient sous le sceau de la « private joke », personne n’y trouvait rien à redire et surtout pas les journalistes qui le fréquentaient et s’en amusaient sans déplaisir. Elu à la tête du pays, ces mêmes plaisanteries ont alors pris une coloration nettement plus polémique qui frôla même l’incident diplomatique avec un pays étranger. L’irruption du numérique n’a fait qu’accentuer cette nécessité d’entretenir une certaine cohérence entre ce que l’on est publiquement et ce que l’on est intrinsèquement. Quitte à devoir raboter certains aspects qui n’ont rien de répréhensible en soi mais qui peuvent devenir de sacrés petits cailloux dans la chaussure. Ce n’est pas Gaspard Gantzer qui dira le contraire même si une fois encore il est loin d’être le seul personnage public à avoir tâté du pétard. A la différence près que d’autres ont pris soin de protéger leur sphère privée.

Pour en savoir plus

– Thomas Wieder – « Qui est Gaspard Gantzer, nouveau patron de la communication de l’Elysée ? » – Le Monde – 24 avril 2014



Un commentaire sur “Fail Facebook du conseiller com’ de l’Elysée : De l’importance du personal branding

  1. Augustin Heuninckx  - 

    Je ne parlerais pas de Personal Branding mais plus d e réputation face au bad buzz. La gestion de son image numérique est bien sur liée a la personnalité de chaque invidu et à ses compétences mais dans ce cas ci le message « soyez vigilant quand à ce que vous publiez ou ce que vous laissez publier » n’a pas grand chose à voir avec du personal branding.

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