Réputation & Expérience Client : Merci pour cet imbroglio, Chronopost !

La mésaventure que je viens de vivre avec Chronopost mérite d’être contée. Elle illustre à merveille la déconnexion totale qui peut exister entre un discours corporate huilé et ce qui se passe dans la vraie vie de l’entreprise. Au-delà de l’irritation profonde que la désastreuse expérience suscite, l’anecdote révèle la persistance d’une communication en carton-pâte qui tente maladroitement d’escamoter des bugs à répétition et à tous les étages. Mon cas est loin d’être isolé comme va en attester cet article. Il vient juste nourrir la réputation déjà bien délétère de Chronopost et qui ne semble pas partie pour s’améliorer malgré les slogans marketing.

Comme de très nombreux Français qui n’ont pas très envie d’aller se frotter aux cohues des achats de Noël en magasins, j’ai opté pour la commande en ligne et la livraison sur un lieu physique. Bien que conscient que la grève hardcore de la RATP et SNCF modifie quelque peu les paramètres, je me risque quand même à remplir mes paniers électroniques dès samedi 14 décembre, histoire de me ménager un peu de marge. Une fois tous mes clics et paiements effectués, je reçois trois notifications de DHL, Darty et Chronopost qui me confirment les dates, horaires et lieux de réception des colis. L’aventure commence.

DHL, Darty au top … Chronopost, ça promet !

Chez DHL, pas de blablas superflus mais du concis précis. Un courriel doublé d’un SMS m’avise que mon colis sera livré mardi 17 dans la matinée au bureau comme convenu. Promesse tenue ! Tout arrive de manière impeccable. Du côté de Darty, on m’annonce une livraison pour le vendredi 20 décembre à mon domicile dans un créneau de 5 heures. Ça tombe bien ! J’avais prévu de télétravailler tant les déplacements dans Paris intra-muros deviennent pénibles avec ces transports en commun au compte-goutte. Le jour dit, je reçois très tôt un SMS du livreur qui affine l’intervalle horaire où il se présentera. Cela sera entre 10h et 12h. Super ! Je ne serai du coup pas consigné chez moi à surveiller du coin de l’œil l’arrivée de l’objet tant attendu puisqu’il s’agit en plus de remplacer mon frigo tombé en rade. A 10h pétantes, un très sympathique et enjoué monsieur sonne. En 10 minutes, l’affaire est dans le sac et tout le monde est satisfait.

Vient le tour de Chronopost. La boutique en ligne me confirme dès le lendemain de mon achat réalisé samedi 14 décembre que Chronopost sera aux manettes pour acheminer mon colis. Ce dernier est de surcroît hyper important puisqu’il contient les cadeaux de Noël de ma fille. Dimanche et lundi s’écoulent mais de Chronopost, point de signe de vie jusqu’à ce courriel de 22h24 lundi soir qui annonce la livraison pour le lendemain à mon bureau. Et là, Chronopost ne lésine pas sur les infos pour suivre pas à pas le périple du colis, modifier la date de livraison, choisir un autre point de proximité. Je clique sur le lien du « tracking du colis ». Ravi, je constate que celui-ci est entreposé dans le Hub Chronopost de Chilly-Mazarin. Cerise sur le gâteau : ma livraison sera 100% verte et respectera l’environnement.

La galère commence …

Mardi 17 décembre au matin, je préviens la réception de mon lieu de travail pour ne pas louper la précieuse marchandise qui arrive. Un SMS m’informe dès 7h du matin que la livraison est en cours. Curieux, je retourne voir où en est le parcours de mon colis. Stupeur ! Celui-ci vient de faire une escapade nocturne dans les locaux de Chronopost à l’aéroport de Roissy. La journée s’écoule. Rien à l’horizon et pour cause ! Je reçois un 2ème SMS à 21h52 : « Un événement nous amène à décaler la livraison du colis au 18 décembre ». Je retourne voir la feuille du route accessible sur le site Web pour essayer de comprendre. Étonnement ! Voilà mon colis revenu à la case départ de Chilly Mazarin.

Mercredi 18, le jour commence à poindre mais cette fois, pas de SMS pour avertir. Je me connecte une nouvelle fois sur la page Web du suivi de colis. Mon carton a semble-t-il décidé d’être un brin baladeur. Ce même jour, le voilà retourné à Roissy à 5h du matin avant de mettre le cap sur Chronopost à Aulnay-sous-Bois puis de repartir dans la nuit à … Roissy ! Très étrange, cette affaire. Mon bureau est pourtant dans le 16ème arrondissement Nord et je vis dans le 17ème arrondissement Sud. Les GPS made in Chronopost ont perdu la boussole et moi mon colis. Au passage, sur la question de la livraison 100% verte, on ne doit pas avoir visiblement la même compréhension de l’impact carbone avec cet acheminement véhiculé tout en zigzag.

Jeudi 19 arrive mais aucune notification de Chronopost. Trou noir ! A nouveau, je visite la page « suivi ». Tiens ? Cette fois, mon colis a choisi d’élire domicile à 11h21 à Beaugrenelle, Paris 15ème. Se rapprocherait-on du dénouement ? Entretemps, j’appelle le numéro Cristal de Chronopost car cette histoire commence légèrement à m’énerver. C’est une voix métallique façon Star Wars qui m’accueille et me demande ma référence colis. Je la lui donne et l’androïde de service me répond par deux fois qu’il ne parvient à identifier le dit colis. Bien la peine d’investir dans la technologie et l’intelligence artificielle pour être si pointu ! Du coup, je me tourne fissa sur le chatbot Léonard. En plus, c’est cool. L’agent conversationnel a décroché en 2018 un trophée AFRC de la relation client. Je lui donne mon numéro de colis. Léonard me recrache aussitôt la même info que sur le site : colis à Beaugrenelle. Au même moment à 14h26, un SMS guilleret me dit : « Bonjour ! Bonne nouvelle ! Chronopost vous informe que votre colis est livré ». Ah oui ? Mais où ?

Opération Twitter & LinkedIn

Entretemps, les blagounettes de Chronopost m’ayant un peu saoulé, je décide dans la matinée de passer par Twitter. J’envoie un DM à 9h25. Bingo ! Margaux, la community manager me répond 30 minutes plus tard. Pas mal pour les statistiques de réactivité. Elle me demande mon numéro de mobile et m’assure que quelqu’un me rappellera dans la journée. De mon côté, je lui communique aussi l’improbable et folle feuille de route de mon colis buissonnier. Il est 10h23 et là, plus rien ! Silence radio. Je relance à 14h06 puisque je viens de voir sur le site Web que le colis est toujours à Beaugrenelle. A 15 minutes donc de mon bureau ! Mais patatras … La CM doit être en pause pipi, miam-miam, syndicale ou je ne sais quoi. Allo, Houston ? On a un problème.

Agacé au plus haut point, j’enclenche donc la vitesse supérieure. Je diffuse sur Twitter un « thread » où je développe mon aventure ubuesque avec Chronopost puis j’enchaîne jusqu’à 16 heures avec une série de tweets ironiques sur l’excellence de l’expérience client à la sauce Chronopost. Je fais d’ailleurs d’intéressantes découvertes. Sur la plateforme d’avis et de notation Trustpilot.fr, Chronopost bat des records de popularité ! Sur 11871 avis émis, 75% d’entre eux qualifient de mauvais le service Chronopost. D’ailleurs, au moment même où je lis, deux avis furieux viennent de s’ajouter.

Je toque de nouveau chez Léonard, le chatbot. Peut-être son IA saura plus m’en dire que la CM ? Pas vraiment ! Le bidule techno me répond : « Merci. Rassurez-vous votre colis est bien en cours d’acheminement. Il est actuellement à l’agence la plus proche du destinataire ». Sauf que je n’ai plus confiance. Je sens que le colis est mûr pour refaire un crochet par Roissy. Cette fois, je monte en gamme. Je trouve les profils LinkedIn de Frédéric Bernard, directeur Expérience Client, Marketing et Communication de Chronopost. Bonne pioche ! Et j’y ajoute celui de Martin Piechowski, président de Chronopost. Ni une, ni deux, je leur envoie via LinkedIn à 15h22 la compilation des mes tribulations erratiques avec leur superbe service client.

Epilogue – Jusqu’au bout, la cata !

A nouveau gros blanc puis début de miracle ! Un nouveau protagoniste chez Chronopost semble avoir entendu mes fusées de détresse. Laurence m’écrit un courriel à 16h32 pour me proposer de la contacter. L’intitulé est sérieux : « Réclamation Comité de Direction Chronopost ». Ouh la, la, ça ne rigole plus ! Comme je n’ai pas vu ce dernier, elle enchaîne aussitôt avec un appel téléphonique. Enfin, une voix humaine qui prend un peu de temps pour tenter de démêler cet imbroglio. Elle m’avoue que la livraison du jeudi 19 ne sera pas possible. Dont acte mais petit problème. Je ne serai pas au bureau vendredi 20 puisque Darty me livre un frigo chez moi. Je demande à changer de point de livraison. On se met d’accord sur un relais colis situé juste en face de mon domicile (Ne me demandez pas pourquoi « pas directement chez moi », je n’ai toujours pas compris !!!). Alléluia !!!

En fin de journée du 19 décembre, la CM réapparaît pas très contente. Elle me confirme qu’elle a parlé avec Laurence et que désormais, tout roule correctement. Néanmoins, elle ne comprend pas vraiment pourquoi j’ai décidé de taper du poing sur la table devant la situation de blocage en train de virer à un sketch de Raymond Devos. Qu’il n’y a pas que moi à traiter et qu’il y a la grève ! Allez, passons ! On se calme et on boit frais. Le colis arrive …

Vendredi 20 à 9h pétantes, je reçois un SMS de Chronopost : « Livraison 100% verte ! Votre colis sera livré entre 9h05 et 10h ». Waow ! Ça, c’est de la précision chirurgicale. Et à 9h05, ça se concrétise. Appel du livreur sur mon mobile pour me dire qu’il est arrivé … à mon bureau ! Les bras m’en tombent. Le monsieur a l’air sympa. Je me permets de lui demander de sonner à tout hasard au bureau mais pas de chance, il n’y a personne. Heureusement, le livreur connaît la gardienne de l’immeuble à laquelle il remet le colis. J’en suis quitte pour enfourcher le vélo et me faire un petit aller et retour sous la pluie fine. Mais, ça y est. On touche au but ! Je détiens enfin le colis même si le pneu de mon vélo a décidé de rendre l’âme à quelques centaines de mètres de mon domicile. J’avertis quand même Laurence et Margaux, la CM avec une petite conclusion grinçante : « On dit souvent en logistique que les derniers kilomètres sont complexes. J’ai donc dû les faire moi-même ». Et de leur partager un joli cliché de mon destrier et du colis devenu enfin réalité.

En attendant, même pas un mot d’excuse de MM. Bernard et Piechowski sûrement occupés à vanter les performances et les prouesses technologiques de Chronopost ! Ah, j’oubliais ! A 9H52, l’équipe Satisfaction Clients me demande d’évaluer la prestation avec ce laïus primesautier : « Nous recherchons sans cesse à améliorer votre expérience de livraison : en partageant votre avis avec nous, vous influencerez directement nos décisions ». Comment dire ?!!!